Peu importe les ravages du virus, en Russie l’Etat ne vaccine pas ses sans-papiers sans-abris.
Le 26 août dernier, le pays enregistrait un nouveau record : 820 morts en 24 heures.
La campagne de vaccination patine dans le pays et explique, en partie, ce triste bilan.
S’il est vrai que la population russe se méfie de son Spoutnik V, ce n’est pas une raison de ne pas penser aux oubliés de toujours, les apatrides dans leur propre pays.
Que se passe-t-il à Saint-Pétersbourg ?
Cette ville compte de très nombreux points de vaccination mobiles où vous pouvez venir sans rendez-vous mais ils ne sont pas accessibles aux sans-papiers. Rappelons que l’on en compte plus de 60’000, de sacrés clusters potentiels.
Nochlechka, face à l’injuste situation, a demandé aux autorités municipales leur aide pour organiser les vaccinations des personnes sans Propiska.
Leur réponse fut à la hauteur de leur désinvolture : ” tout le nécessaire a déjà été fait. “
Ils n’ont pas de Propiska, ils n’existent pas, donc ne peuvent attraper le Covid.
Voilà la logique des fonctionnaires.
Face à ce constat, les volontaires de Charity Hospital, en collaboration avec la Fondation Caritative Diakonia et le Club Kinonia, ont organisé eux-mêmes une campagne de vaccination.
C’est un grand succès et, en même temps, une goutte dans l’océan nous dit Ksenia Ershova, coordinatrice du projet.
Avec mes collègues, poursuit-elle, malgré les chicaneries étatiques, nous avons mis sur pied des vaccinations au Centre d’Accueil de Nochlechka, à l’Abri de Nuit et lors des arrêts du Bus de Nuit.
Il est évident que la force et les ressources de nos organisations ne suffisent pas à résoudre l’entier du problème de la vaccination des sans-abris, loin de là, mais au moins on agit, alors que l’Etat nous met des bâtons dans les roues, conclut, désabusée, Ksenia Ershova.
La bureaucratie, véritable sable mouvant
De son côté, le directeur de Charity Hospital, Sergey Levkov, s’étonne lui aussi de l’attitude de l’Etat : au départ l’obstacle semblait insurmontable, ils refusaient que nous vaccinions dans la rue. Allez savoir pourquoi puisque l’on fait leur travail.
Après bien des palabres, nous avons, tout de même, réussi à trouver une solution face à ces difficultés bureaucratiques.
Que se passe-t-il à Moscou ?
A Moscou, le problème est encore plus aigu.
Le nombre de sans-papiers sans-abris est bien plus important et à ce jour aucune vaccination n’a été entreprise envers cette population.
Depuis le mois d’avril 2021, Nochlechka Moscou a interpellé maintes fois le ministère du Travail et celui de la Protection sociale, ainsi que le ministère de la Santé.
La réponse fut la même qu’à Saint-Pétersbourg : ” toutes les conditions sont déjà réunies.”
Derrière cette sentence lymphatique, nos sans-papiers sans-abris ne peuvent pas se faire vacciner.
Même dans le centre municipal créé pour aider les sans-abris, ceux qui n’ont pas de Propiska ne peuvent recevoir le vaccin.
Le 25 août 2021, la directrice de Nochlechka Moscou, Daria Baibakova, a assisté à une réception avec la directrice adjointe du Département du travail et de la protection sociale de la ville de Moscou, Madame Lyudmila Viktorovna Mitryuk.
Un espoir ?
Cette dernière a déclaré que, d’ici la semaine prochaine, elle et ses collègues essaieraient de régler le problème.
Daria Baibakova l’espère : nous sommes très reconnaissants que l’affaire semble avancer enfin. Evidemment, nous allons suivre de près l’évolution de ce dossier des plus urgents.
En effet, poursuit Daria, nous ne pouvons accepter qu’au milieu d’une pandémie, des dizaines de milliers de personnes se retrouvent bannis de la vaccination.
Nous continuerons d’insister pour que toute personne puisse préserver sa vie et sa santé, quelle que soit sa situation administrative.
A l’heure actuelle, Saint-Pétersbourg est la seule ville de Russie où les sans-abris sont vaccinés.
A Moscou, à Saint-Pétersbourg, ils sont des dizaines de milliers de sans-papiers sans-abris, nous avons besoin de vous, aidez-nous à leur donner de l’humanité.