A bas les préjugés

Pendant la majeure partie de sa vie, Slavka fut un vrai criminel. Son apparence en garde encore quelques stigmates, des tatouages légèrement flous aux avant-bras, un mystérieux anneau noir fiché à son annulaire, et son visage marqué par des balafres dissimulées en partie par une barbe.

On peut changer
Et pourtant, aujourd’hui, Slavka est un homme décent, plein de tact, joyeux et ouvert, il travaille comme consultant à la Fondation Diakonia, participe activement à motiver les sans-papiers sans-abris de notre Centre dédié à la réinsertion. Et les dimanches, Slavka prépare la nourriture pour une église qui la distribue à ses fidèles les plus pauvres.
Slavka raconte : ma rééducation n’a pas été facile : les habitudes, quelques qu’elles soient, ne disparaissent pas en deux ou trois jours.
J’ai séjourné six mois au Centre de Réinsertion de Nochlechka, le maximum. Là, comme les autres participants, j’ai reçu soins, gîtes et couverts.
La réhabilitation du projet est basée sur les principes de l’association des Alcooliques Anonymes.
Elle comprend des sessions individuelles et en groupe avec des conseillers en toxicomanie et des psychologues.
Aujourd’hui, poursuit-il, je me sens un homme neuf, cabossé par mon existence mais avec une telle énergie de passer à autre chose et tout ceci grâce à Nochlechka, ses psychologues, ses conseillers sociaux, et ses avocats.
N’oublions pas que je n’avais plus aucune identité administrative lorsque j’ai rencontré Nochlechka.

Un passé tortueux
Tout jeune, Slavka a connu le monde de la pègre, nous conte-t-il.
Chez mes parents, à Briansk vivait caché incognito un parrain. Ami de son fils, je fus attiré très vite par ce monde sombre.
Les enfants, à cette époque, étaient très demandés, ils étaient impliqués dans des tâches modestes mais dangereuses. On nous employait car les moins de 14 ans ne pouvaient être pénalisés. Ils nous payaient avec un verre de vodka, des cigarettes et du statut social.
Slavka s’est progressivement fait des amis, grâce auxquels il pouvait aller, sans crainte, même tout gamin, dans les discothèques les plus prestigieuses, l’argent jaillissait pour acheter des vêtements de marque et de la drogue.
Après une vaine et rapide tentative à l’école professionnelle d’où il se fit expulser, Slavka dû s’engager dans l’armée où là-non plus, on ne l’a pas retenu.
En raison d’une série de combats sérieux et d’un conflit avec ses supérieurs, quelques mois après Slavka retournait à Briansk, y retrouvait son monde de la pègre, et de cas en casses, de violence en coups de mains, Slavka a naturellement terminé en prison.

Tellement d’argent
Pendant que Slavka purgeait sa condamnation, ses amis des bas-fonds gravissaient les échelons sociaux et même purent “légaliser” leurs affaires dans les années 2000.
Dès sa libération, Slavka les rejoint à Moscou. Et le voilà filant la belle vie, voiture chère, appartement de luxe, argent facile. Slavka est garde du corps d’un gros bonnet de la pègre.
Il y avait tellement d’argent à l’époque, dit Slavka, que je ne savais tout simplement pas où le dépenser. J’avais beau jouer au grand seigneur, dépenser des fortunes dans les clubs, les divertissements, les vêtements, les voitures de marque, l’immobilier, la consommation de drogues, l’argent continuait à couler à flot.

La chute
Slavka devient accro, totalement dépendant à la cocaïne. Il trompe ses associés et cela ne plait pas, mais pas du tout. Ils ont voulu le descendre, ils l’on raté.
Slavka s’enfuit, se retrouve à errer dans les rues de Saint-Pétersbourg, sans papier, sans un kopeck en poche, une désintoxication forcée souligne Slavka. J’ai en vraiment bavé de passer ainsi, d’un moment à l’autre, de l’opulence à plus rien, et surtout plus de drogue, ce fut réellement douloureux.
Dans ma dégringolade, j’ai connu le Bus de Nuit et par la suite leur Centre de Réhabilitation, une vraie planche de salut.

Dans le cercueil, les poches vides
D’accord, aujourd’hui, j’habite un minuscule deux pièces, dans une banlieue paumée, je me déplace en métro et non plus en BMW noire, mais je n’ai aucun regret, une nouvelle page s’ouvre et peu importe que je meure sans le sou.
Vous voyez, conclu Slavka, j’ai enfin pu inviter ma mère chez moi, dit-il en souriant. Maman est venue avec son neveu et je leur ai présenté ma fiancée, le mariage est prévu pour fin septembre.
Je n’ai jamais pensé que ce serait comme ça avec moi.

Merci de votre soutien, donnons plus d’humanité.

 

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