C’est effrayant, on se demande pourquoi l’on subit une telle expérience de survie s’étonne encore Vladimir, miraculé de l’hiver moscovite.
Je ne suis pas un ours
Vladimir, le regard fatigué, le visage marqué par tant d’adversité, une barbe à l’abandon, a récemment survécu aux moins quinze degrés qui frappaient, il y a encore peu, la capitale russe.
Je m’étais emménagé une espèce de niche dans une ravine. Mais contre le froid, rien à faire, je ne suis pas un ours protégé par sa fourrure.
Vladimir a travaillé dans la région de Moscou dans une usine de tissage. Il vivait dans une auberge de jeunesse et après la fermeture de l’usine, il y a sept mois, il s’est retrouvé à la rue.
Plus d’emploi plus de logement, plus de logement plus de propiska, plus de propiska impossible de dénicher un travail, etc, etc, etc.
Aujourd’hui, Vladimir a retrouvé des forces. Nous le rencontrons au Centre d’Accueil de Nochlechka Moscou.
Vladimir nous raconte à quel point il est difficile, pour ne pas dire impossible, à un sans-papiers sans-abris de recevoir l’aide de l’Etat.
Une errance sans fin
A Moscou, il y a de très nombreuses opportunités de travail cependant si vous n’avez pas cette foutue Propiska, inutile de se présenter au chef de chantier. Ou alors vous savez que vous serez exploité jusqu’au trognon et peut-être même pas payé souligne Vladimir.
Pour moi ce fut une errance sans fin dans cette immense métropole. Et lorsque la nuit commence à tomber, il faut se mettre à trouver un abri où dormir.
Même cela n’est pas simple du tout car les bonnes planques sont, bien évidemment, déjà occupées par d’autres sans-logis et ils ne se laissent nullement déloger.
Ils défendent très violemment leur bout de territoire ajoute Vladimir.
C’est ainsi que de galère en galère j’ai fini dans cette ravine.
Mais où est l’Etat ?
– Voulez-vous dire que lorsqu’une personne se trouve dans une telle situation, il n’y a pas de services municipaux qui pourraient et seraient obligés d’aider demande-t-on à Serguei Antonov, l’un des responsables sociaux du Centre, qui nous accompagne lors de notre entrevue avec Vladimir.
– Oui. Si une personne n’a nulle part où vivre, à Moscou, il n’y a aucun endroit où elle pourrait séjourner pendant un certain temps répond Serguei Antonov.
Il existe bien des abris gouvernementaux pour les sans-abris, mais ils ne sont disponibles que pour les personnes qui ont un passeport (Propiska), et le lieu de la dernière immatriculation doit être impérativement Moscou.
Sur les plus de 100’000 sans-abris moscovites seulement un petit 14% rempli cette condition administrative nous informe Serguei Antonov.
Face à cette réalité, face à l’hiver meurtrier, que ce soit à Moscou ou à Saint-Pétersbourg, Nochlechka est indispensable aux milliers et milliers de sans-papiers sans-abris.
Nous aimerions en faire tellement plus, mais nous sommes toujours à la limite de nos moyens financiers.
Aidez-nous à les aider tout au long de la saison hivernale.
Sauvons des vies.