Revenez plus tard

” Repassez la prochaine semaine, ou débrouillez par vous-même “, cette phrase, Igor Borisovich l’a entendue de dizaines et des dizaines de fois de la part des dispensaires de santé moscovites.
Igor Borisovich, 56 ans, sans-papiers sans-abris il y a encore six mois de cela, a essayé par tous les moyens de se désintoxiquer.

Les traumatismes du guerrier 
Ancien soldat, Igor Borisovich est revenu du front complétement alcoolique. Vous n’imaginez pas la pression psychique à laquelle nous sommes confrontés. Bien sûr le physique n’est pas épargné mais si vous n’êtes pas blessé, pas trop de problèmes. Par contre le psychisme, s’exclame Igor Borisovich, c’est réellement très éprouvant. Les continuelles scènes violentes auxquelles vous êtes confrontés vous rongent l’esprit. Pour effacer, pour oublier, de la gnole, encore de la gnole.
Et ce n’est pas mon retour à la vie civile qui a changé ce régime. Les fantômes du champ de bataille sont en moi.
Ma solde s’est vite évaporée, et ce n’est pas les cadavres de bouteilles que j’accumulais dans la chambre louée qui m’aidaient à payer le loyer. Bref, j’ai fini à la rue.

Je veux me désintoxiquer
La misère qu’est la survie m’a tout de même fait comprendre qu’il fallait que j’abandonne la boisson. D’autant plus que celle que l’on ingurgite dans la rue est vraiment un poison.
D’un dispensaire à l’autre, je répétais aux médecins que j’avais des crises, que j’avais besoin d’une aide médicale, que seul je n’arriverai pas à me sevrer, sans parler que dans la rue vous êtes entourés d’autres personnes qui sont tout aussi de gros buveurs que vous-même.
Peu importe le dispensaire où je me rendais, leur réponse uniforme a toujours été semblable : ” l’hospitalisation n’est pas autorisée. Pas de quota, pas de place, revenez plus tard “, explique encore Igor Borisovich.

Sortir de cette galère
Malgré le fait qu’Igor Borissovitch était un habitué du Bus de Nuit, que les bénévoles lui conseillaient d’aller à notre Centre d’Accueil, Igor Borissovitch, têtu, continuait ses inutiles visites aux centres médicaux.
Après des mois, enfin, soudainement, Igor Borissovitch décide de se rendre à notre service de consultation.
Masha Muradova, notre assistante sociale, le prend en main, lui récupère ses papiers d’identité, se débrouille pour qu’Igor Borissovitch soit gratuitement hospitalisé pour être désintoxiqué.
Vous savez Masha Muradova, j’aurais aimé y arriver il y a 20 ans, dit, ému, Igor Borissovitch.
Masha Muradova nous raconte : depuis qu’Igor Borissovitch est revenu de sa cure, il est si joyeux, cela fait plaisir à voir. Igor se rend régulièrement aux entretiens des alcooliques anonymes et nous lui cherchons un travail.
J’aimerais devenir agent de sécurité, souligne Igor, et vous savez, ajoute-t-il, je n’ai plus touché une goutte d’alcool depuis un mois et demi.

L’aide
Si Igor Borissovitch n’avait pas appris du chauffeur du Bus de Nuit que les travailleurs sociaux de Nochlechka pouvaient l’aider à accéder à une désintoxication, à retrouver son identité administrative, il aurait continué à tourner en rond, à écouter cette cynique ritournelle : l’hospitalisation n’est pas autorisée, pas de quotas, pas de places, revenez plus tard, et ceci, jusqu’à ce qu’il n’en ait plus la force, conclut Masha Muradova.

Notre tâche est immense, aidez-nous à sauver des vies.

Important : malgré les embûches du boycott, nous arrivons toujours à transférer votre appui financier.

 

 

 

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