
Un jour, ivre, mon mari a violemment frappé notre fils Vladimir. Aucune mère ne le tolérerait, je suis partie avec mon enfant et nous avons tout perdu. Perdu mon identité administrative, perdu mon travail, perdu mes droits parentaux, perdu mon Vladimir, 9 ans à cette époque. Il a été placé à l’orphelinat, et moi à la rue, raconte Nasha les yeux embués.
Que de détresse
Et me voilà à errer, un peu comme une folle, je dois le reconnaître, je suis si désespérée. Je n’ai plus rien, plus rien que la misère qu’offre la rue aux sans-abris, vous comprenez, plus rien, s’écrie-t-elle.
Masha entame une longue dégringolade.
Atteinte tant dans sa santé mentale que physique, voilà plusieurs semaines que nous nous attelons à remettre Nasha sur pied, explique Igor, l’assistant social de Nochlechka.
35 ans déjà, que nous sommes là pour aider ces naufragés de la vie. 35 ans à leur permettre d’imaginer un futur plus semblable à celui des citoyens lambdas.
Un autre monde
Vous savez, poursuit Igor, la rue brise les gens, déforme leurs paramètres. Quand vous survivez dans la rue, au fil du temps, votre structure sociale se transforme. Vos normes sociétales changent. C’est pourquoi, au début, il nous est difficile de les aider, de trouver un langage commun avec les sans-abris. La signification de “normalité” n’est plus du tout la même pour vous, pour nous, que pour eux.
Avant tout, nous devons apprendre à parler leur langage, reconnaître leurs critères.
Bien évidemment, en 35 ans d’expérience, Nochlechka a appris. Cependant, chaque individu est bien différent et à chaque fois, nous déployons bien de la patience, du tact, pour réellement entrer en contact, les aider, explique encore Igor.
Récupérer mon gamin
Aujourd’hui, il y a exactement quatre mois que je vis à Nochlechka. Un vrai miracle qu’ils m’aient pris sous leurs ailes. Sans cela, peut-être que je serai morte, souligne Nasha, euphorique.
En ce moment, les gars de Nochlechka (les avocats) sont en train de me retrouver une identité administrative. Avec elle, je pourrais trouver un travail. Nochlechka nous aide aussi dans ce domaine, incroyable.
Je travaillais comme secrétaire dans une usine de sanitaire. Mais je suis prête à essayer un autre emploi, l’important est que je travaille, ai un logement. Sans ces conditions, inutiles d’essayer de récupérer Vladimir.
Je me demande comment est Vladimir ? Vous pensez en quatre ans ? Vous croyez qu’il me reconnaîtra ? En plus il doit être en pleine adolescence. J’en tremble d’avance, dit encore Nasha, pleine d’espérance.
Ce récit illustre bien la facilité à laquelle peut être confronté n’importe quel citoyen russe. Une fois sans propiska, sans identité administrative, il devient très difficile de s’en sortir, tant est rapide la dégringolade sociale.
Nous faisons tout pour leur venir en aide, à Saint-Pétersbourg comme à Moscou.
Notre tâche est immense, soutenez-nous à ce qu’ils retrouvent espoir.
Important : malgré les embuches du boycott, nous arrivons toujours à transférer votre appui financier.