“Pour la première fois depuis que je la connais, Ekaterina me répond par un splendide sourire.
Je viens de lui dire qu’elle a une très belle coupe de cheveux,” nous conte Liza Savchenko, l’assistante sociale de Nochlechka.
Ekaterina, la septantaine bien ancrée, sans-papier sans-abri, a récemment demandé l’aide et la protection de Nochlechka.
Elle sort de chez le coiffeur, un service mis à disposition mensuellement par Nochlechka
Un coup de couteau
Il y a peu, Ekaterina fut poignardée dans le tram public, le no 16. Ce moyen de transport, Ekaterina l’utilise comme chambre à coucher.
“On m’y laisse dormir, nous confie-t-elle. Avec ma carte d’identité fournie par Nochlechka pas de crainte des contrôles, et puis, je ne dérange personne, les employés me connaissent.
Ma jambe saignait, par chance je n’étais pas très loin de Nochlechka, je m’y suis trainée, j’avais bien mal, et avec la neige cela n’était pas facile.”
“Heureusement que Sergueï, le garde de nuit, l’a reconnue”, ajoute Liza Savchenko. Il a pu appeler l’ambulance qui l’a emmenée à l’hôpital Botkin. (Le seul établissement qui accepte de s’occuper des sans-papiers blessés ou malades.)
Loin de tous
“J’ai croisé Ekaterina il y a deux mois et demi, explique l’assistance sociale.
Elle venait au Centre d’Accueil pour prendre une douche, laver ses habits. Discrète comme si elle avait peur de déranger, je voyais sa maigre silhouette, son visage parcheminé, triste, les yeux toujours à fixer le plancher.
Ekaterina ne disait rien, ou si peu, en réponse aux questions qu’on lui posait. Elle s’asseyait dans le couloir d’attente, toujours dans les mains, une encyclopédie bien élimée par l’usage.
Et, à la tombée de la nuit, elle filait rejoindre son tram no 16. ”
Exister enfin
“Le passage à l’hôpital m’a comme réveillée explique Ekaterina. J’ai compris que je pouvais croire et faire confiance à Nochlechka.
Je viens de leur demander de m’héberger et de m’aider à restaurer mon identité. Je ne suis plus très vive sur mes jambes, mais je tiens à faire, autant que possible, les démarches.
D’ailleurs j’ai dans ma besace les multiples formulaires à remplir.”
Pour Liza Savchenko, remarquer de telles transformations psychologiques est un réel bonheur.
“Vous voyez comment la personne s’est progressivement sentie en sécurité, elle a gagné en force, a cru en elle-même et dans les gens qui l’entouraient et … elle a fait le premier petit pas vers nous. Certains quittent leur carapace protectrice en quelques heures, d’autres ont besoin de plusieurs jours, parfois de plusieurs mois.
L’essentiel ici n’est pas de se précipiter, mais d’être patient et d’être là, de les aider, ils en ont tant besoin.”
Notre tâche est immense.
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