Pour les sans-abris sans-papiers pas de répit à noël. Le froid, la nuit qui n’en finit plus, la recherche d’un abri, de nourriture, rythment notre quotidien, raconte Larisa, une nouvelle occupante de la Tente de la Survie, proche du canal Shkipersky à Saint-Pétersbourg.
Une vraie étuve
A l’intérieur, une cinquantaine de personnes se préparent pour la nuit. Toutes et tous se sont déchaussés, ils se sont allongés sur des tapis en mousse. Il y a une heure, le Bus de Nuit est passé avec de la nourriture.
La chaleur des corps se mélangent à celle du poêle à mazout, le contraste thermique avec l’extérieur est violent. Dehors, il neige à gros flocons, le vent souffle, les toiles de la tente claquent.
Comment peut-on survivre en extérieur dans de telles conditions, se demande, à haute voix, le responsable de la Tente?
Une cave gelée pour tout abri
Je suis arrivée ici ce soir, c’est la première fois, explique Larisa. Heureusement, j’ai croisé une autre sans-abri qui m’a indiquée ce lieu. Enfin un peu de chaleur. Ces dernières nuits, je les ai passées dans une cave d’un immeuble avec d’autres personnes. Comme moi, elles ont tout perdu. Il y faisait glacial, et tellement humide, on se tenait les uns contre les autres pour se réchauffer.
J’ai 56 ans, et depuis début novembre, j’erre dans les rues. Avant, je trimais dans une usine de vêtements. Une horreur.
De l’enfer au froid
Notre journée de travail durait douze heures, nous étions hébergées dans un dortoir au-dessus des entrepôts. Pour se laver, un robinet d’eau froid et pour les habits, une vieille machine à laver coutant 100 roubles. Pour se nourrir, une kitchenette. Nous devions acheter notre vaisselle et, bien évidemment, la nourriture, idem pour la literie.
Il y avait des caméras partout, elles surveillaient tous nos faits et gestes. Une de mes collègues a déballé un bonbon et l’a mis dans sa bouche. Deux minutes plus tard, le gardien est arrivé et lui a dit, “Vous mangez ici, comme vous le savez et vous le voyez écrit sur les murs, c’est strictement interdit. Et cela dans la poubelle, qu’est-ce que c’est ? Des emballages de bonbons, levez-vous, allez ouste, vous êtes renvoyée“.
Je n’ai pas tenu longtemps, je suis partie avec 5’000 roubles en poche (44,77CHF). Une misère, et très vite je me suis retrouvée à la rue.
Des ombres perdues
Quand vous êtes sans logement, il est très difficile d’être bien sur soi. Tout de suite on voit que vous êtes une clocharde. Vous avez beau essayé d’améliorer votre apparence en passant aux toilettes de la gare, les passants vous considèrent comme une moins que rien. Vous imaginez ce que c’est pour retrouver un travail…
Et si vous avez de la chance et dégottez un emploi, vous n’aurez pas d’argent jusqu’à votre premier salaire. Pas d’argent pour se loger, pour se nourrir, même pas assez d’argent pour s’acheter du savon.
il est vraiment très difficile de revenir à sa vie antérieure, lambda.
C’est si dur de vivre comme ça. C’est terriblement dur, sans cesse tu es fatiguée et tu ne peux te reposer calmement, tu ne dors pas bien, toujours sur le qui-vive.
Et très vite ta santé se dégrade, ajoute encore Larisa
Centre d’Accueil
Depuis, Larisa a été prise en charge par Nochlechka. Pavel Lyak, un des travailleurs sociaux raconte, à son arrivée au Centre, sa fatigue permanente nous a préoccupés. De plus, j’ai remarqué que Larisa avait de la peine à respirer. Nous l’avons accompagnée dans un dispensaire. L’un des rares qui reçoit les sans-papiers sans exiger des pièces d’identité. Ils ont procédé à une fluorographie des poumons. Résultat, des poumons avec des ombres.
Nos avocats lui ont rétabli ses papiers puis Larisa a pu se rendre dans un hôpital où elle a subi une opération pulmonaire. Aujourd’hui, chez nous, Larisa se remet de son opération.
Notre travail humanitaire est immense. Nous avons tant besoin de votre soutien, merci de nous aider à sauver des vies.
Important : malgré le boycott bancaire, notre aide financière se poursuit.